Surveillance au travail : le juste équilibre s’impose - Septembre 2017

Selon la Cour européenne des droits de l’homme, la lecture par l’employeur des communications électroniques du salarié peut constituer, si certaines règles ne sont pas respectées, une violation du droit au respect de la vie privée.

Dans cette affaire très médiatisée (CEDH, 5 septembre 2017, n° 61496-08), un ingénieur roumain avait été licencié après que son employeur eut constaté, en surveillant ses communications électroniques, qu’il avait utilisé la messagerie de la société à des fins personnelles, en infraction au règlement intérieur. Faisant valoir la violation de son droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance, le salarié avait alors saisi la Cour européenne des droits de l’homme. Il a finalement obtenu gain de cause, après que les juges eurent constaté que l’intéressé n’avait pas été informé de la nature et de l’étendue de la surveillance opérée par son employeur, ni de la possibilité que celui-ci avait d'accéder au contenu même de ses messages. Une façon de rappeler aux employeurs, qu'en matière de surveillance, un juste équilibre s'impose, aucun contrôle ne pouvant s'effectuer sans que le salarié n'ait été au préalable informé de ce qu'il en était exactement.

Cette décision ne devrait toutefois pas bouleverser l’ordre des choses dans les entreprises françaises puisqu’il existe déjà une obligation de respect de la vie privée et un certain nombre d’exigences en matière de contrôle de l’utilisation d’internet et de la messagerie électronique.

Focus sur...

Le droit au respect de la vie privée des salariés

En France, les dispositions légales sont claires. Si l'employeur a le droit de contrôler et de surveiller l'activité de ses employés, aucune information concernant personnellement un salarié ne peut être collectée par un dispositif qui n'a pas été porté préalablement à sa connaissance (article L 1222-4 du Code du travail). De même, l’information recueillie ne saurait porter atteinte de manière disproportionnée au respect de la vie privée de l’intéressé.

Conscients de ces règles, et soucieux de mener à bien les missions qui leurs sont confiées, les détectives privés sollicités par les employeurs ne font donc état dans leurs rapports que des griefs susceptibles d'être légalement reprochés au salarié. Ces rapports constituent néanmoins des sources d’informations très précieuses. Grâce au travail d’investigation effectué en amont, ils permettent, dans bien des cas, de présenter en justice une requête à fin de constat, un moyen efficace de se constituer des preuves en toute légalité (article 145 du nouveau Code de procédure civile). Rien de tel en effet pour prouver la faute d’un salarié ou des faits litigieux (concurrence déloyale, débouchage, détournement de cliente, etc.) et ainsi faire valoir valablement ses droits.

Les juges et la preuve

Travailler durant ses congés est une faute

Une salariée, qui occupe les fonctions de chef d’équipe sécurité cynophile au sein de la société dans laquelle elle a été embauchée, met à profit ses congés payés pour travailler dans une entreprise concurrente à la sienne.

Apprenant cette activité parallèle, son employeur, mécontent, prend la décision de la licencier pour faute grave. Mais l’intéressée conteste cette mesure en justice et tente d’obtenir que soit déclaré sans cause réelle et sérieuse le licenciement prononcé à son encontre.

A l’appui de sa démarche, elle fait valoir l’absence de préjudice pour son employeur. En vain.

Le fait pour un salarié d'exercer pendant ses congés des fonctions identiques à celles occupées dans son entreprise, pour le compte d'une société directement concurrente et située dans une même zone géographique, constitue un manquement à l’obligation de loyauté à laquelle il est tenu, celle-ci perdurant même pendant les périodes de suspension du contrat de travail. Dans ce contexte, la Cour de cassation, saisie du litige estime que ces agissements sont d'une gravité telle qu'ils justifient un licenciement, même en l'absence de tout préjudice pour l’employeur. La salariée devra donc être déboutée de ses demandes.

La décision de justice