Chèque falsifié et charge de la preuve : la banque responsable ? - Décembre 2022

 

Le détective et la preuve

Dans un arrêt du 9 novembre 2022, la chambre commerciale de la Cour de cassation est venue rappeler que s’il incombe à l’émetteur d’un chèque d’établir que celui-ci a été falsifié, il revient néanmoins à la banque tirée, de prouver que celui-ci n'était pas affecté d'une anomalie apparente. Explications.

De longue date, la jurisprudence considère que si la falsification d’un chèque est apparente, et que la banque n’a pas été en mesure de la détecter, elle verra sa responsabilité retenue. Cette solution vaut tant pour la banque présentatrice que pour la banque tirée. Une telle anomalie apparente sera retenue, par exemple, en présence d’un chèque falsifié présentant des traces de grattage, d’effacement ou de maquillage du nom inscrit dans un premier temps sur le titre. En revanche, à défaut d’anomalie apparente, le principe de non-ingérence du banquier doit à nouveau prévaloir.

Dans cette affaire, grâce à la falsification du nom du bénéficiaire, un homme avait encaissé un chèque qui ne lui était pas destiné. L’émetteur du chèque avait alors assigné devant les tribunaux sa banque en réparation du préjudice subi. A l’appui de sa démarche, il soutenait que l’établissement financier avait manqué à son obligation de vigilance lors de l’encaissement du chèque. Il finira par avoir gain de cause. Il appartient en effet à la banque tirée de prouver que le chèque n’était pas affecté d’une anomalie apparente. Or, en l’espèce, la banque avait détruit l’original du chèque et la photocopie qu’elle produisait, de très mauvaise qualité, ne permettait pas de constater l’absence d’anomalie matérielle. C’est dans ce contexte que les Hauts magistrats ont donc considéré que la banque ne rapportait pas la preuve qui lui incombait. En cela, sa responsabilité doit être engagée.

Cass, com, 9 novembre 2022, pourvoi n° 20-20.031

Focus sur...

Vers une défiscalisation de la pension alimentaire ?

Lorsqu’un couple avec des enfants divorce ou se sépare, la pension alimentaire versée par le parent qui n'a pas la garde du ou des enfants est déductible de son revenu imposable. En contrepartie, l'autre parent déclare ces sommes, tout en bénéficiant des parts fiscales des enfants qu'il a à sa charge.

Une proposition de loi actuellement débattue envisage de modifier ce dispositif en défiscalisant la pension alimentaire. Ainsi, le parent ayant la charge des enfants ne serait plus taxé au titre des sommes qu’il perçoit et, de son côté, l’autre parent ne pourrait plus déduire de ses revenus ces sommes. Cet avantage serait toutefois limité à 4 000 € par enfant et par an, soit un versement d’un peu plus de 300 € par mois et par enfant. Affaire à suivre donc.

Les juges et la preuve

Durée excessive de la procédure pénale

La Cour de cassation est venue rappeler que la durée excessive de la procédure ne suffit pas à elle seule à justifier son annulation. Il appartient toutefois à la juridiction de jugement, chargée d'examiner l'affaire au fond, de prendre en compte les effets du temps qui se sont écoulés, notamment en cas de dépérissement des preuves, susceptibles d'empêcher les parties d'en discuter la valeur et la portée ; en cas de détérioration de l'état de santé du prévenu rendant impossible sa comparution personnelle dans des conditions lui permettant de se défendre ; ou en cas de dépassement du délai raisonnable pour déterminer le choix de la peine.

La Cour confirme ainsi sa jurisprudence par laquelle elle refuse l'annulation de la procédure en raison d'un délai excessif alors que chacun des actes est régulier, ne pas être jugé dans un délai raisonnable n'emportant pas en soi, selon les Hauts magistrats, une atteinte aux droits de la défense.

La décision de justice